« Ta Gueule »

“Ta gueule”. Ne le prenez pas personnellement, “quoi qu’il se passe n’en faite pas une affaire personnelle”; lorsque je dis “ta gueule” ce n’est pas à vous que je m’adresse et ce que  signifie cette expression pour moi sera sans doute différent de ce qu’elle signifie pour vous. Néanmoins vous la recevez, vous la percevez comme moi je la perçois et peut-être qu’elle vous agresse peut-être pas.

Cet été pendant trois semaines j’ai accompagné une jeune personne dans son autisme. C’était à la fois une mystique aux yeux exorbités, une pepette, et une révolutionnaire. J’ai donc soupé des “ta gueule” servis au petit-déjeuner, à l’heure du goûter, au diner et au bord du lit, prononcé avec un petit sourire et une moue que l’on aurait pas soupsonné se délecter d’expressions de la sorte. Bref, un délice pour elle, un bordel pour moi.

Ce qui m’intéresse ici est d’abord la joie ressentie dans le jeu de la transformation et de la métamorphose mais aussi l’idée de la boucle, de quelque chose dont le début et la fin sont contigents ; une phrase qui commence et se termine mais pourrait ne jamais avoir commencé comme ne jamais vouloir se terminer.